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LA GAP ! ENTRE LA POIRE ET LE FROMAGE

20. 07. 17

C’est l’histoire d’un chef d’entreprise prospère qui décide de céder son activité.

Après avoir retenu au sein des cabinets spécialisés, ACTION REPRISE pour l’accompagner dans la cession envisagée, il reçoit les prétendants afin de retenir la meilleure proposition.Après avoir retenu au sein des cabinets spécialisés, ACTION REPRISE pour l’accompagner dans la cession envisagée, il reçoit les prétendants afin de retenir la meilleure proposition.

Bien entendu (c’est humain…), c’est vers le prix d’acquisition proposé le plus élevé qu’inclinent ses penchants.
La dot proposée semble convenable,  et le mariage s’annonce bien.
La L.O.I. tenant lieu de faire-part, on est convenu de se dire un Oui définitif dans quelques semaines, le temps pour les petits scribes de se noyer dans les détails juridiques et comptables de l’opération ; lorsque tout à coup, au beau milieu du repas de fiançailles, un des convives (généralement le conseil de l’acquéreur) prononce la formule cabalistique : « quid de la GAP ? ».
- La quoi ??? 
- C’est la Garantie d’Actif et de Passif, Monsieur LEVENDEUR, et principalement les éventuels éléments non apparents et qui pourraient diminuer le prix de cession.- Quel Actif ? De quel Passif parlez-vous Maître ? Je n’ai aucun passif dissimulé d’aucune sorte ! 5 années de bénéfices consécutifs ! Vous le savez bien, 5 fois le bénéfice net ! c’est sur cette base que nous avons fixé le prix !
Voila le moment désagréable. Il arrive sur le début de la digestion, et va, en plus de générer quelques aigreurs d’estomac, constituer l’objet principal des discussions de fin de repas, et celui des jours suivants.
Oui, il va falloir garantir l’acquéreur des éventuels défauts et des petites manies discutables que la Mariée aurait sciemment dissimulé ou inconsciemment ignoré.
Non seulement ses éventuels défauts, mais aussi les conséquences des décisions qu’elle aurait pu prendre 3 ou 4 ans auparavant et que l’administration fiscale, les organismes sociaux, tel ou tel créancier, ancien salarié ou tout autre intéressé pourrait vouloir remettre en cause.
Non, vous n’y couperez pas Monsieur LEVENDEUR, et plutôt que de faire votre mauvaise tête, autant prendre les devants et anticiper la rédaction de cette fichue garantie, selon les 5 principes suivants :
1/ A ton propre conseil, sa rédaction tu confieras2/ Un plancher haut de déclenchement tu négocieras3/ Un plafond infranchissable tu exigeras4/ Une durée limitée, tu prévoiras5/ Au Tribunal de commerce de ton siège social, la compétence tu attribuerasLa garantie de passif étant ce qu’elle est, aucun texte de Loi ne vient l’encadrer. Par paresse ou par trouille, les conseils disposent généralement de modèles prêt-à-garantir listant avec précision la plupart des passifs non apparents au moment de la cession et susceptibles d’être révélés ultérieurement.
Plutôt que de donner dans le copié-collé, autant passer aux aveux avant le mariage :
Oui, j’ai une pratique des avances sur dividendes que mon commissaire aux comptes valide timidement du bout des lèvres, mais pour autant, cela fait 30 ans que je fonctionne comme ça, et si vous voulez remettre en cause ce fonctionnement, je ne réponds de rien ni pour le passé, ni pour l’avenir.
Oui, j’ai quelques risques de contentieux prud’homal pour des heures supplémentaires en dépit d’une convention de forfait, mais la jurisprudence n’étant pas figée, je ne vois pas pourquoi je garantirai un aléa judiciaire que ni vous ni moi ne maitrisons.
OK, pour partager avec vous le risque de redressement fiscal sur les indemnités kilométriques, mais seulement à hauteur de 50 % du montant du redressement s’il advient.Etc…
Autant de confidences prénuptiales qui éviteront les déconvenues une fois la bague au doigt.
Soyons imaginatifs ! Rien ne contraint l’étendue de la garantie et il peut être avisé, non seulement de la restreindre, mais d’en lier l’existence à d’autres sujets : un earn-out en cas de non révélation de la GAP, par exemple, ou toute autre fantaisie qu’il nous plairait d’imaginer.
L’expérience, cette lanterne accrochée dans le dos qui n’éclaire que le chemin parcouru, à quelques vertus et votre conseil est devenu psychologue avec le temps… Si la GAP n’est pas au menu, autant mettre vous-même les pieds dans le plat, et suggérer que vous n’en accepterez pas ou seulement à certaines conditions : à nouveau, rien n’est obligatoire.Si le plancher est bas, négociez le plafond, ou bien vous allez, soit vous cogner dans les poutres, soit vous perdre dans les étoiles. Enfin, si le sujet de la GAP devient quasiment le seul sujet de discussion, autant zapper le dessert et commander les cafés : votre acquéreur envisage déjà par le biais de la GAP de se rembourser d’une partie du prix d’acquisition !
Cette GAP  n’a pas que de mauvais côtés : elle est l’occasion de limiter votre responsabilité si celle-ci venait à être mise en œuvre. Et oui ! Sans GAP, la responsabilité de droit commun reprend le dessus et elle est sans limite.La garantie de la garantie peut être apportée par un établissement bancaire, dont vous ne pourriez être garant qu’à hauteur d’une quote-part seulement de son montant. De la même manière vous pouvez l’assurer et limiter ainsi votre propre engagement.
Enfin et surtout elle va rassurer votre futur acquéreur et même si les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent, autant les formuler dans le feu de la passion plutôt que de se voir reprocher quelques vilains défauts après quelques années…



Emmanuel Mouchtouris - Avocat AssociéCabinet SAINT CYR AVOCATS, société d’avocats